Entretien avec Aminata Dramane Traoré…
Alors que, sur l’exigence des autorités maliennes, la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest vient seulement d’accepter, le dimanche 23 septembre 2012, le refus du déploiement de troupes combattantes étrangères à Bamako, l’entretien que nous a accordé Aminata Dramane Traoré, de passage à Paris le 18 septembre dernier, acquiert une dimension supplémentaire.
Notre entretien portait sur L’Afrique mutilée, le dernier ouvrage de cette grande voix de l’altermondialisme africain, coécrit avec Nathalie M’Dela-Mounier. Cet essai est né de la rencontre entre deux écrivaines animées par un objectif commun : servir de porte-voix à une société civile malienne dont les femmes sont les grandes oubliées.
Publié au Mali par les éditions Tamaa et diffusé en France par l’association L’Oiseau Indigo, L’Afrique mutilée constitue un de ces textes clef dont la portée est immense : il y a non seulement deux voix – malienne et française – qui s’en élèvent, mais il y également toutes les autres, ces voix si souvent confinées à un écho ténu, alimenté par des préconçus misérabilistes, bâtis sur l’image simpliste des « femmes victimes ». « Nous sommes toutes les femmes, nous ne venons pas de nulle part et n’allons pas n’importe où », écrivent les auteures… Un des enjeux de cet ouvrage est clairement de faire entendre au lecteur qu’il y a d’une part les représentations – ce que l’on en fait – et d’autre part la réalité, dans toute sa complexité.
L’accès au dialogue citoyen n’est apparemment pas le même pour tous et surtout pour toutes. Le Mali est actuellement amputé des deux-tiers de son territoire. Paradoxalement, la possibilité d’un véritable dialogue démocratique et de possibles solutions civiles à la crise sont aujourd’hui étouffées par des plans d’ajustement structurel, imposés au nom d’un bien étrange « développement ».
L’Afrique mutilée n’est pas un ouvrage larmoyant ; il s’agit d’un texte humaniste et engagé, une œuvre de combat qui s’attaque à des images préconçues du Mali et de l’Afrique. Aminata Dramane Traoré et Nathalie M’Dela-Mounier en appellent, en chœur, à la construction d’un nouvel espace de dialogue et de compréhension, reposant avant tout sur le Maaw Folo, que l’on pourrait traduire par « Les gens d’abord » !
Raphaël THIERRY
[Lire l’entretien sur le portail de la revue Africultures]
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