La richesse du travail du Professeur Pierre Fandio réside selon nous en deux éléments essentiels : si Pierre Fandio est incontestablement un des meilleurs spécialistes des littératures camerounaises (mentionnons aussi Robert Fotsing Mangoua ou Marcelin Vounda Etoa), il est aussi un des rares universitaires africains à s’intéresser à la question des champs littéraires et de l’édition (au même titre que Charles Djungu Simba en RDC).
Dans son article « La littérature camerounaise d’expression anglaise : heurs et malheurs d’un champ culturel en constitution », Pierre Fandio revient donc sur les nouvelles thématiques caractérisant cette « nouvelle littérature » [de langue anglaise], [qui se remarquent] sur le plan de l’institution même de la littérature.
Au sein de cette institution, relève Pierre Fandio, « une des premières instances notables est celle de l’édition qui se rapatrie effectivement et se professionnalise plus ou moins ».
Largement éditée à l’étranger (Nigeria notamment), lorsque la littérature en anglais est publiée au Cameroun, c’est « généralement le fait d’éditeurs locaux de fortune ou de publications à compte d’auteurs qui ne disent pas leur nom. [Pierre Fandio revoie d’ailleurs au chapitre] quatre de [son] essai La Littérature camerounaise dans le champ social, Grandeurs, misères et défis, [qui analyse] comment les éditions Nouremac à l’origine de près du quart de la production avant le milieu des années 80 sont, en réalité, une modeste imprimerie basée à Limbe qui n’a aucune ambition éditoriale au sens où on entend habituellement ce mot ».
P. Fandio ajoute que « George Ngwane et ses collègues perpétuent ainsi tout simplement, avec une meilleure technologie, la tradition du « Shoesting Publishers », cheville ouvrière de la « Onitsha Market Literature ». C’est ce qui explique que la qualité technique de certains ouvrages ainsi mis sur le marché autant que la qualité esthétique propre des autres, laisse parfois franchement à désirer. Nombre de textes ainsi publiés ne connaissent d’ailleurs qu’une diffusion confidentielle : ils sont introuvables à Buea, capitale intellectuelle du Cameroun anglophone depuis l’avènement de l’université du même nom, située à 20 minutes de route de leur ville supposée d’édition ».
Comme dans d’autres parties du Cameroun, « la fin des années 80 et surtout les années 90 voient, quant à eux, émerger des éditeurs professionnels : Buma Kor, Patron Publishing House, Cosmos Educationnal Publishers, etc. qui font de l’édition un véritable métier ; tandis que les Éditions CLE de Yaoundé, après une hibernation de près d’une décennie, inscrivent quelques titres dans leur catalogue : Lake God and Other Plays (CLE, 1999) de Bole Butake, Change Waka and His Man Sawa Boy (CLE, 2001) et Three Plays (CLE 2003) de Bate Besong, The Death Cerificate (CLE, 2005) de Alobwed’Epie, etc. ».
Nous noterons enfin que, de la sorte, les éditeurs du Cameroun anglophone se sont associés à la dynamique engagée à partir des années 1990 à Yaoundé (créations de nombreuses nouvelles structures, à l’image des Presses Universitaires de Yaoundé de Japhet Bidjek, des Presses Universitaires d’Afrique de Serge Kouam Dontchueng ou encore du Centre de Réflexion et d’Action Culturelle de David Ndachi Tagne).
[D’après un article de Pierre Fandio publié dans le Cameroon Tribune]
[Ce billet est également publié sur le portail de la revue Africultures]
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